Depuis quelques jours, le compte personnel de formation (CPF) semble être au centre de toutes les attentions. Deux changements importants devraient avoir lieu dans les semaines à venir : l’interdiction du démarchage commercial et la mise à contribution des élèves avec un « reste à charge ».
Interdiction du démarchage commercial
« Consultez votre solde et réclamez votre formation intégralement financée. » Nous sommes nombreux à recevoir ce genre de SMS nous invitant à utiliser nos droits sur le compte personnel de formation (CPF). C’est particulièrement vrai en ce qui concerne la formation au permis de conduire qui est la première formation financée (en montant).
Ce genre de sollicitation devrait bientôt être de l’histoire ancienne. Le Sénat a adopté en fin de semaine dernière une proposition de loi, initiée par des députés de la majorité présidentielle, pour lutter contre la fraude au compte personnel de formation et à interdire le démarchage de ses titulaires. Voté sans modification, ce jeudi 8 décembre, le texte est donc considéré comme définitivement adopté, ouvrant la porte à une promulgation rapide. Ses dispositions devraient devenir force de loi dès le début de l’année 2023.
La proposition de loi interdira la prospection commerciale des titulaires du CPF, que soit par téléphone, SMS, email ou sur les réseaux sociaux, sauf si la sollicitation concerne une action de formation en cours.
Les auto-écoles ont relativement peu recours au démarchage commercial par SMS ou par téléphone. En revanche, elles devront être attentives sur les publicités diffusées sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, Snapchat, Tiktok).
Les auto-écoles devraient pouvoir continuer à mentionner qu’elles acceptent les financements via le CPF. En revanche, les messages du type « Ton permis gratuit avec le CPF » devraient être interdits. Les décrets d’application viendront préciser l’esprit de la loi.
Amendes dissuasives
Les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) seront habilités à rechercher et constater les infractions. Les amendes administratives en cas de comportements frauduleux promettent d’être dissuasives : 75 000 € pour une personne physique, 375 000 € pour une personne morale.
Il faut dire que les fraudes progressent exponentiellement également. La Caisse des dépôts et consignations a chiffré le préjudice détecté à plus de 43 millions d’euros en 2021, cinq fois plus qu’en 2020.
Pour améliorer la détection de formations frauduleuses, le texte va faciliter la coordination entre l’État et les différents opérateurs. Les croisements seront facilités entre les différentes autorités, en matière de vérification d’identité, de contrôle de l’habilitation ou de fausses domiciliations. Un pas dans ce sens a d’ores et déjà été entamé avec la mise en place de France Connect + et de l’Identité numérique.
La Caisse des dépôts et consignation aura par ailleurs la possibilité de recouvrir plus rapidement les sommes indûment perçues, sans saisine préalable de la justice administrative.
Mise en place d’un « reste à charge »
Deuxième changement important à venir : les formations financées en intégralité par le compte personnel de formation (CPF), sans reste à charge pour son titulaire, sont amenées à disparaître.
Ce dimanche, à la faveur de l’examen en deuxième lecture à l’Assemblée de la partie dépenses du projet de budget 2023, le gouvernement a précisé le mécanisme de « régulation » qu’il entend mettre en œuvre. Un amendement propose de recentrer les dépenses sur les formations qui favorisent l’emploi et pose clairement le principe d’un ticket modérateur.
L’objectif de cet amendement est de permettre à l’Etat de faire des économies. En clair, le nettoyage dans les formations éligibles, la fin du démarchage publicitaire (évoqué plus haut) et la lutte contre la fraude ne suffisent pas, aux yeux du gouvernement.
Pour aller plus loin, l’amendement « propose d’instaurer une participation du titulaire, quel que soit le montant de droits disponible sur son compte ». Cette participation pourra être proportionnelle au coût de la formation dans la limite d’un plafond ou fixée à une somme forfaitaire. Elle s’appliquera pour toute formation et les bilans de compétences.
Point important, les chômeurs sont épargnés, ainsi que les salariés dans le cadre de projets co-construits avec leur employeur. Autrement dit, si le titulaire du compte trouve un accord avec sa DRH, individuellement ou via un accord collectif, il n’aura rien à sortir de sa poche. Toutes les modalités – pourcentage de reste à charge, montant minimal d’abondement par l’employeur et, plus généralement, condition d’intervention d’un tiers – seront précisées par décret en Conseil d’Etat.
Le temps que le décret soit finalisé et que les logiciels soient prêts, le ticket modérateur ne devrait pas voir le jour avant le deuxième trimestre 2023, toujours selon l’entourage de la Première ministre Elisabeth Borne.