À compter du 1er avril 2024, les auto-écoles proposant des formations financées grâce au compte personnel de formation (CPF) et ayant recours à la sous-traitance devront respecter de nouvelles obligations. Les sanctions en cas de non-respect pourront être très lourdes. Explications et analyse.
Une évolution prévue dès 2022
Jusqu’à présent, un organisme de formation disposant de la certification Qualiopi pouvait proposer des formations financées grâce au CPF et sous-traiter tout ou partie de ces formations à des tiers ne disposant pas de cette certification.
La loi de finances 2023 et la loi n° 2022-1587 du 19 décembre 2022 avaient ouvert la voie à un encadrement plus strict de la sous-traitance dans le cadre du CPF. Dans un premier temps, certains ont pu craindre que tous les sous-traitants aient l’obligation de détenir la certification Qualiopi. Le décret n°2023-1350 du 28 décembre 2023 est venu apporter plus de nuance et de précisions sur ces obligations.
Les auto-écoles concernées par ces nouvelles obligations
Le permis de conduire étant la première formation financée par le CPF, les écoles de conduite seront directement concernées par l’encadrement de la sous-traitance des formations éligibles au CPF, dès le 1er avril. Cette information a été confirmée par les représentants de la DGEFP (Délégation générale à l’Emploi et à la Formation professionnelle) au cours de deux visioconférences cette semaine.
Qui est concerné ?
Concrètement, les auto-écoles concernées sont celles qui (1) proposent des formations éligibles au CPF et (2) sous-traitent une partie de ces formations.
La sous-traitance peut prendre plusieurs formes :
- avoir recours à un moniteur indépendant avec le statut d’auto-entrepreneur ;
- au sein d’un groupe de sociétés, sous-traiter des formations à une autre société du groupe ;
- sous-traiter des formations à une structure partenaire (sans lien capitalistique direct ou indirect).
Nouvelles obligations et sanctions
Du côté de l’employeur, l’auto-école doit faire attention à plusieurs points :
- Elle ne pourra pas sous-traiter plus de 80% de son chiffre d’affaires réalisé avec les formations CPF. Ce chiffre s’entend au global (et non pas élève par élève). Il est fixé par l’arrêté du 3 janvier 2024. En 2024, la période considérée sera celle allant du 1er avril au 31 décembre.
- En ce qui concerne les formations CPF sous-traitées, l’auto-école (« donneur d’ordre ») devra :
- faire signer au sous-traitant un contrat comprenant les mentions obligatoires prévues au décret du 28 décembre 2023 et accompagné des justificatifs de régularité fiscale et sociale ;
- s’il a le statut d’auto-entrepreneur, s’assurer qu’il est organisme de formation et qu’il dispose d’un numéro de déclaration d’activité (NDA) ;
- s’il est en société (SAS, SASU, SARL, etc), il devra disposer d’un NDA et de la certification Qualiopi.
Côté sous-traitants, s’il intervient dans des formations financées par CPF alors il devra obligatoirement disposer d’un numéro de déclaration d’activité. S’il n’est pas auto-entrepreneur, il devra en outre obtenir la certification Qualiopi.
- un dé-référencement de son catalogue sur EDOF ;
- de perdre son NDA (la Caisse des Dépôts communiquant avec la DREETS) et donc sa certification Qualiopi ; et,
- que la Caisse des Dépôts demande rétroactivement le remboursement de formations financées.
Que retenir ?
Ces nouvelles obligations sont relativement « légères » à mettre en place. Donneurs d’ordre et sous-traitants devraient réussir à s’y conformer facilement… d’autant plus que la Caisse des Dépôts devrait faire preuve de souplesse dans les premiers mois.
Les plateforme en ligne (Ornikar, En Voiture Simone, Lepermislibre), qui ont massivement recours aux indépendants devront s’assurer que leurs sous-traitants obtiennent leur NDA rapidement, sans quoi les élèves mobilisant leur CPF devront faire face à des délais d’attente rallongés.
Les donneurs d’ordre devront s’assurer que le sous-traitant dispose du NDA mais également qu’ils respectent les obligations des organismes de formation, notamment la déclaration annuelle du bilan pédagogique et financier (BPF).
Dès le 1er avril, une auto-école ne pourra plus sous-traiter plus de 80% de son chiffre d’affaires réalisé avec les formations CPF. Ce pourcentage, qui pourra évoluer par la suite, n’est problématique que pour les acteurs qui ne dispensent aucune formation et dont le business model est 100% de la mise en relation. Le CPF n’ayant pas vocation à financer des commissions. Ces acteurs étant rares sur le marché de l’enseignement de la conduite, cela ne devrait avoir aucun impact.
Enfin, ces mesures devraient avoir un impact sur les critères du label de qualité auto-école. Pour continuer à disposer de l’équivalence avec la certification Qualiopi, les critères du label devraient légèrement évoluer. Des réunions ont eu lieu courant février au Ministère de l’Intérieur avec les différentes organisations professionnelles. Un arrêté devrait paraître prochainement.
Bonjour, alors je ne fais pas le CPF, mais pour moi à la lecture les AE en ligne ne pourront plus prendre ces formations, ils ont 100% d’effectif en sous-traitance il me semble ? Merci de l’éclairage.
@chatpa : les AE en ligne (comme les AE traditionnelles) devront effectuer au moins 20% de leur CA réalisé sur CPF, avec des enseignants salariés. Donc oui les AE qui sous-traitent 100% de leur activité devront modifier leur modèle économique pour y intégrer du salariat…
Ok merci pour ta réponse Baptiste, donc a priori ils ne vont plus faire de CPF, car un changement de modèle ne semble pas être dans leur ADN.
Je suis curieux de voir en combien de temps les sanctions vont tomber, je pense que cela va être long, très long 😉